Vous avez certainement déjà entendu cette affirmation. Elle justifie souvent une course effrénée au Chiffre d’Affaires (CA) que s’impose de nombreuses entreprises. Des objectifs extrêmement ambitieux si ce n’est irréalistes peuvent être imposés aux équipes et tous les moyens deviennent bons pour obtenir des contrats.
De la nécessité d’augmenter son CA
De nombreuses entreprises qui ont des charges importantes au regard de leur activité et qui ont du mal à y faire face ont tendance à se tourner vers leur département ou fonction commercial(e) pour résoudre ce problème.
La première question que se posent les entreprises qui ne génèrent pas de richesse ou qui en génèrent insuffisamment est celle de leurs revenus. Et la réponse généralement donnée est qu’il faut vendre plus.
Mathématiquement, si j’ai des charges de 1 million et que mes revenus sont de 600 mille, j’estime que mes revenus doivent être de plus d’1 million pour que je puisse espérer couvrir mes charges et faire des bénéfices. Pour atteindre mon seuil de rentabilité, mes revenus doivent augmenter d’au moins 400 mille.
Si je souhaite réaliser un investissement pour mon entreprise et qu’actuellement je pense que je n’en ai pas les moyens, une augmentation de mes revenus devrait me permettre de générer les fonds dont j’ai besoin sur un horizon défini.
Supposons que mes commerciaux demandent à avoir une formation en techniques de vente mais que j’estime n’avoir ni l’argent, ni le temps pour le leur permettre. S’ils veulent des formations, ils doivent vendre plus… Et pourtant Dieu seul sait que pour que ce soient de bons vendeurs, il faut qu’ils soient suffisamment formés.
L’augmentation de mon CA apparait donc comme la réponse toute trouvée aux problèmes que je peux rencontrer.
Il faut les moyens de sa politique… mais aussi la politique de ses moyens.
Si je souhaite augmenter mon CA — ce qui dans l’absolu est une bonne chose car toute entreprise a vocation à grandir, du moins dans la première phase de sa vie — je dois d’abord me demander si mes objectifs de croissance sont réalistes.
Puis-je réellement envisager de passer du point A où je suis aujourd’hui, au point B où je souhaite aller demain, avec les moyens que j’ai et dans les délais que je me fixe ?
Si je donne des objectifs irréalistes à mon équipe, je ne peux pas m’attendre à les voir se réaliser. Je dois donc me demander si les individus de mon équipe (fonctions commerciale, production et support) ont la capacité de réaliser ce que je leur demande :
- Ont-ils la formation nécessaire
- Ont-ils les ressources matériels / outils nécessaires
- Ont-ils le temps nécessaire
- Ont-ils la motivation et la forme physique nécessaire
- Mon équipe est-elle bien dimensionnée
Si mon analyse me permet de déterminer que j’ai la capacité de réaliser ces objectifs sans fondamentalement changer ma structure actuelle, ou si cela reste possible en nécessitant des ajustements de ma part, je dois pouvoir savoir à quel coût
:
- Dois-je redimensionner mon équipe
- Dois-je investir plus et alourdir ma structure financière
- Ma stratégie marketing et commerciale a-t-elle un coût trop élevé
Je mettrai particulièrement en relief le cas des entreprises qui veulent avoir des contrats à tout prix. Il faut qu’elles se posent la question de savoir à quel moment cela ne fait plus sens d’accepter un client car elles courent un double risque en matière de réputation et de rentabilité. Sur ce dernier point, en tant que dirigeant d’entreprise, je peux parfois faire des paris sur le long terme. J’accepte de perdre de l’argent sur un contrat pour entrer sur un marché ou pour entretenir une relation partenariale existante. C’est une action ponctuelle qui fait office d’investissement et dont je me dois d’évaluer les risques. Mais accepter de perdre de l’argent ou de ne pas en gagner de manière systématique pose un problème structurel à mon entreprise.
Je ne peux pas me permettre de ne pas créer la richesse que je suis censée redistribuer pour permettre la viabilité de mon entreprise et de ma relation avec ceux qui y contribuent.
Si on revient à mon analyse globale, je dois m’assurer de ne pas perdre en essayant de gagner.
Ce qui compte finalement, ce n’est pas le CA que je génère, mais la richesse que je crée.
Il faut donc que je m’assure de parvenir à un équilibre entre mon niveau de charge et mon niveau de revenu afin de créer le niveau de richesse que je souhaite pour l’entreprise. Seule la richesse créée peut être réinvestie
au service de l’entreprise et de ses partie-prenantes.
Dans l’exemple précédent où mon entreprise perd 400 mille et où je veux augmenter mes revenus pour y pallier, si j’augmente mes revenus de 400 mille et que mes coûts augmentent de 300 mille, je perds finalement 300 mille au lieu de 400 mille. C’est un moindre mal, mais cela ne résout pas mon problème.
Il peut même arriver sans que je m’en rende compte, que je dépense 500 mille pour générer 400 mille parce que je n’ai pas une maîtrise suffisante de mes coûts. Dans ce cas précis, j’aggrave ma situation et il aurait mieux valu que je ne génère pas ces revenus supplémentaires.
Finalement une question importante qui se pose pour que je puisse créer de la richesse est celle de la maîtrise et de l’optimisation de mes coûts. Suis-je sûr(e) qu’aujourd’hui, tous mes efforts sont justifiés. Je dois me poser la question de savoir si l’intégralité des coûts que je supporte méritent d’être dépensée. Est-ce que je n’ai pas la possibilité d’optimiser ma structure financière
pour m’assurer de créer un maximum de valeur au regard de mon niveau d’activité.
Lorsqu’on parle d’optimisation, beaucoup de gens pensent à des licenciements mais ce volet ne doit être abordé qu’en dernier ressort. Observer, analyser mon entreprise et mettre en place des règles de bonne gestion
est la première chose à faire. Il faut pouvoir comprendre la nature des différents coûts et leurs leviers pour pouvoir éliminer les coûts inutiles.
Si mon activité ne justifie pas l’utilisation de certains coûts mais que je suis obligé de les supporter pour une raison ou pour une autre, je peux réallouer mes charges
pour éviter de subir des pertes inutiles.
Si j’occupe les locaux et que je n’ai pas besoin de toutes les pièces à l’heure actuelle, je peux mettre à la disposition d’autres une partie de ces locaux et générer des revenus qui permettront de compenser les charges additionnelles
que je supporte au regard de mon activité.
Je peux mutualiser certains de mes coûts
avec d’autres acteurs qui partagent les mêmes intérêts que moi. Si un modèle approprié est développé, même les ressources humaines peuvent pour partie être affectées à des missions externes ou être partagées par plusieurs acteurs.
De nombreuses entreprise, j’en suis certaines peuvent résoudre des problèmes qui leur semblent insurmontables en regardant dans un miroir pour identifier leurs zones d’inefficiences afin de faire un travail qui leur permettra d’assainir leur base.
En synthèse, certes, il me faut générer des revenus pour créer de la richesse et réaliser mes objectifs, mais cela est très insuffisant pour que je sois certain(e) d’y parvenir. Une gestion saine de mes coûts sera le premier facteur déterminant de mon potentiel à créer de la richesse. On aura beau verser de l’eau dans un tonneau percé, il ne se remplira pas…
La même logique peut être appliquée à la gestion des finances personnelles.